Compte-rendu : Journée d’études ” Collections japonaises et japonismes en Alsace ” 22 avril 2022
Par Delphine MULARD (enseignante-chercheuse contractuelle, université de Strasbourg)
Journée d’études organisée le 22 avril 2022 par Le Département d’études japonaises (Université de Strasbourg), en collaboration avec l’UR 1340 GEO et la Bibliothèque nationale universitaire (Bnu).
En 1871, l’Alsace devient une province de l’Empire allemand. Ce dernier est alors en concurrence avec la France et la Grande Bretagne non seulement militairement, mais aussi culturellement. L’enjeu est la suprématie sur les arts décoratifs et, pour ce faire, de proposer des objets esthétiques qui puissent être produits en quantité. Les motifs japonais, que l’Occident découvre avec l’ouverture des frontières du pays dès 1854, jouent un rôle majeur dans cette quête. En outre, pour reconstruire et dynamiser une province dont le potentiel industriel est fort, l’Empire allemand ouvre dès 1885 un musée des arts décoratifs auquel sera adossée en 1892 une école des arts décoratifs. Les fonds de ce nouveau musée seront constitués d’objets de provenance et de techniques diverses, au sein desquels les pièces japonaises occupent une place de choix. Lorsque l’Alsace et Strasbourg intègrent à nouveau l’escarcelle française en 1918, le patrimoine hérité de l’époque allemande est dénigré et la politique d’acquisition et d’exposition des objets se tournent vers la production locale. Les collections japonaises gagnent les réserves et tombent progressivement dans l’oubli. Le même destin se devine dans l’histoire des collections japonaises du musée Unterlinden de Colmar, du musée d’impression sur étoffe de Mulhouse ainsi que des collections de la bibliothèques humaniste de Sélestat. Si l’exposition « Samouraïs, guerriers et esthètes », ouverte entre le 11 mars et le 13 juillet 2022 à la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg (Bnu) a permis de sensibiliser le public sur la présence de collections japonaises en Alsace, l’étude et la mise en valeur de ces objets restent à faire.
La journée d’étude du 22 avril, qui s’est tenue dans l’auditorium de la Bnu avait précisément pour titre « Collections japonaises et japonismes en Alsace ». Elle s’articulait en trois temps. Le premier panel était centré sur l’histoire et la nature des collections. Ont été mis en avant l’importance des textiles moyen-orientaux (Nourane Ben Azzouna) ainsi que la profusion des poncifs japonais utilisés pour l’impression sur étoffe ou katagami (Ikuta Yukie) dans les collections du musée des arts décoratifs de Strasbourg. Les objets ayant été en partie acquis auprès des musées des arts décoratifs de Berlin, Hambourg et Leipzig, une présentation était consacrée à l’histoire des collections japonaises en Allemagne (Stephan von der Schulenburg). Le second panel était consacré à la figure du collectionneur, auquel un programme de recherches de l’Institut national d’Histoire de l’art est consacré : « Collectionneurs, collecteurs et marchands d’art asiatique en France, 1700-1939 » (Pauline Guyot). Au sein des collections japonaises, l’importance de la marchande d’art Florine Langweil, qui a alimenté les musées alsaciens de dons conséquents, a été rappelée par Elizabeth Emery. Enfin, le dernier panel s’intéressait à l’impact que les objets japonais ont pu avoir sur la création culturelle et artistique contemporaine en Alsace et plus largement dans le Grand-Est. C’était donc la question de l’existence d’une forme de japonisme régional qui était examinée, à travers les interventions de Julien Kiwior sur l’artiste Paul Leschhorn et Valérie Thomas sur l’Ecole de Nancy. La journée d’étude s’est clôturée sur une conférence consacrée à l’histoire des collections japonaises en France assurée par Geneviève Lacambre.
Regroupant sous un format hybride des universitaires, conservateurs et galeristes français, allemands et japonais, cette journée d’étude initie un premier pas dans la connaissance des collections en Alsace et dans le Grand Est. La qualité des interventions et la richesse des échanges lors de cette journée laisse espérer l’ouverture prochaine d’un programme de recherches plus conséquent qui, nous l’espérons, sera fructueux et couronné de succès.
Des enregistrements de certaines interventions sont disponibles : pour les écouter, adressez-vous à l’organisatrice : delphine.mulard@gmail.com ; mulard@unistra.fr
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
SFEJ (17 janvier 2023). Compte-rendu : Journée d’études ” Collections japonaises et japonismes en Alsace ” 22 avril 2022. Japon(s). Consulté le 21 mars 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/u1me